L’AEUMC cherche à prévenir et à combattre la corruption

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Mondial Publication Novembre 2018

Après des mois de négociations, le Canada, les États-Unis, et le Mexique ont annoncé le 30 septembre 2018 un accord de principe sur un nouvel accord commercial, soit l’Accord États-Unis–Mexique–Canada (AEUMC). Bien qu’il ne soit pas encore signé, l’AEUMC est censé remplacer et moderniser l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) dès le 1er janvier 2020.

Parmi les changements importants, une disposition portant sur la lutte contre la corruption figure dorénavant dans l’AEUMC. En effet, l’AEUMC consacre le chapitre 27 entièrement à ce sujet, qui était absent de l’ALENA, mais qui figure notamment au chapitre 26 de l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste. Les exigences de l’AEUMC à cet égard incluent certaines restrictions visant les agents publics étrangers dans chaque pays et l’obligation d’adopter des règles et des règlements solides pour éviter et combattre la corruption.


Principales dispositions anticorruption de l’AEUMC

Le chapitre de l’AEUMC sur l’anticorruption obligera les pays à 1) adopter des mesures visant à combattre la corruption, 2) faire respecter ces mesures de façon efficace, 3) promouvoir l’intégrité chez les agents publics et 4) promouvoir la participation active du secteur privé à la lutte contre la corruption dans les échanges internationaux.

Mesures de lutte contre la corruption

Afin de combattre la corruption dans les échanges internationaux, les parties adopteront ou maintiendront des lois qui criminalisent :

  • l’offre d’un pot-de-vin à un représentant du gouvernement (ou l’acceptation d’un pot-de-vin par un représentant du gouvernement) dans les échanges internationaux, ou l’aide ou l’encouragement à commettre un tel acte ou le complot en vue de la commission d’un tel acte ; et

  • le détournement par un agent public de quelque chose de valeur qui lui est confiée en raison de son poste.

Les parties ont également convenu d’adopter des mesures assurant des normes de comptabilité et de vérification saines qui interdisent l’inscription de comptes « hors livres », de dépenses non existantes et de transactions semblables.

En reconnaissant la nécessité de déceler et d’empêcher la corruption, l’AEUMC exige l’adoption de mesures de protection des dénonciateurs qui signalent ces infractions de bonne foi contre les représailles injustifiées. Au Canada, cette exigence ne s’applique qu’aux mesures prises dans le cadre de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, qui établit une procédure confidentielle pour la divulgation d’actes répréhensibles dans le secteur public fédéral et prévoit une protection législative contre les sanctions relatives aux divulgations d’actes répréhensibles.

Application efficace des mesures de lutte contre la corruption

L’AEUMC établit clairement que l’adoption des mesures susmentionnées sans moyens d’exécution efficaces ne sera pas suffisante. Bien que l’accord permette aux parties d’exercer leur pouvoir discrétionnaire dans l’application de leurs lois respectives en matière de lutte contre la corruption, il envisage également la coopération entre les organismes chargés de faire respecter la loi dans chaque pays afin de mieux déceler et de combattre la corruption.

Promotion de l’intégrité chez les agents publics

L’AEUMC vise à promouvoir l’intégrité, l’honnêteté et l’imputabilité des agents publics. Les obligations des pays comprennent : l’adoption de mesures et de procédures qui permettent la sélection et la formation adéquate des agents publics vulnérables à la corruption; la promotion de la transparence; la gestion des conflits d’intérêts réels ou potentiels; et l’encouragement de la dénonciation de la corruption. Cette partie rend obligatoire l’adoption de codes de conduite relatifs à l’exercice approprié des charges publiques ainsi que de sanctions en cas de violation de tels codes ou des lois concernant la lutte contre la corruption.

Promouvoir la participation active du secteur privé

Il importe de souligner l’accent mis sur l’interaction et la coopération entre les secteurs public et privé dans la lutte contre la corruption dans le cadre du commerce international. À cette fin, les pays ont convenu de promouvoir la participation active du secteur privé dans la lutte contre la corruption. Les parties doivent aussi prendre des mesures pour sensibiliser le public à l’égard du risque de corruption et doivent [traduction] « s’efforcer d’encourager » les entreprises privées à adopter des contrôles de vérification internes afin d’aider à prévenir et à détecter la corruption.

Obligations anticorruption du Canada et de l’AEUMC

Le Canada est bien placé pour se conformer aux obligations anticorruption de l’AEUMC. En vertu de la Loi sur la corruption d’agents publics étrangers (LCAPE) actuellement en vigueur, constitue une infraction criminelle le fait d’offrir un pot-de-vin à un agent public étranger en contrepartie de l’accord de cet agent d’agir (ou de s’abstenir d’agir), ou de convaincre un agent d’utiliser son poste pour influencer les actes ou les décisions d’un État étranger.

La LCAPE va encore plus loin que l’AEUMC en ce qui a trait aux infractions liées aux « livres comptables ». Alors que l’AEUMC exige que les parties [traduction] « adoptent ou maintiennent les mesures pouvant être nécessaires » concernant la tenue des livres comptables, la LCAPE crée des infractions comptables qui érigent en infraction criminelle la manipulation des livres comptables en vue de faciliter ou de dissimuler la corruption d’un agent public étranger.

En outre, l’AEUMC exige que les parties [traduction] « reconnaissent les effets nuisibles des paiements de facilitation » et encourage les entreprises à interdire ou à décourager pareils paiements. Les paiements de facilitation sont des paiements effectués dans l’objectif d’accélérer ou d’obtenir l’exécution d’« actes courants » d’un agent public qui n’exigent pas que ce dernier exerce son pouvoir discrétionnaire. Les paiements de facilitation constituent une infraction en vertu de la LCAPE depuis octobre 2017.

À retenir

Les dispositions anticorruption de l’AEUMC reflètent les efforts concrets et louables que déploient les États-Unis, le Mexique et le Canada en vue de pallier le risque réel de corruption dans le cadre du commerce international et en vue de promouvoir la transparence.

Bien que les pays parties à l’AEUMC ne l’aient pas encore signé et que cet accord soit susceptible d’être modifié, le chapitre sur la lutte contre la corruption offre de précieuses indications sur l’avenir du commerce international alors que les secteurs public et privé adoptent tous deux une position plus ferme contre la corruption. Les entités publiques ou privées qui participent au commerce international doivent par conséquent être conscientes de leurs obligations non seulement en vertu des lois sur la lutte contre la corruption de leur pays, mais également des attentes plus étendues de leur pays en matière de commerce international, comme il est énoncé dans l’AEUMC, visant à prévenir et à combattre activement la corruption.



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